samedi 18 octobre 2014

LETTRE OUVERTE A JACK LANG



Lettre ouverte à monsieur Jack Lang,
Président de l’Institut du Monde Arabe à Paris

Monsieur le président,
Demain, mardi 14 octobre 2014, s’ouvrira à l’Institut du Monde Arabe à Paris  la grande manifestation culturelle marocaine, appelée : Le Maroc contemporain à l’Institut du Monde Arabe, dont se sent, injustement exclu et arbitrairement écarté, le grand dramaturge marocain que je suis et le grand metteur en scène de théâtre et de cinéma que je prétends être en toute démiurgie.
«Le quémandeur des Arts que je suis, continuellement combattu et saboté, à défaut d’être sollicité pour présenter LA CHUTE, vous dis, monsieur le président Jack Lang, combien nous serons heureux et fiers, Sophia Hadi et moi-même, d’être invités par vous pour prendre part à L’année du Maroc à l’Institut du Monde Arabe, en présentant  LA CHUTE d’Albert Camus, MIRACLE DU 30 FEVRIER ainsi que projeter mon dernier film REGARDE LE ROI DANS LA LUNE, un film qui survole un siècle d’une partie de l’Histoire de mon pays, un film qui demeure privé des écrans dans mon propre pays.», vous ai-je écrit dans ma lettre du 2 aout 2014, lettre restée sans réponse.
A l’image de la France républicaine, qui fut longtemps une généreuse terre d’asile politique pour les hommes et les femmes, venus à la recherche de la liberté, de la fraternité et du pain quotidien, je ne pouvais imaginer l’Institut du Monde Arabe, dès sa naissance en 1987, que comme une véritable ruche d’asile artistique pour créateurs, arabes et non arabes, brimés et interdits de créer et de s’exprimer dans leurs pays arabes et non arabes. C’est faire preuve de naïveté et de candeur, enfantines, que de penser, comme je l’ai pensé stupidement, il y 28 ans, que  l’Institut du Monde Arabe pouvait ouvrir ses portes aux créateurs et démiurges, combattus et marginalisés dans leurs propres pays. Un Botero arabe, de surcroît musulman, c’est inadmissible, impensable et punissable. Et pourtant, comme ce sera beau, très beau, de voir fleurir sur l‘esplanade de l’IMA des œuvres de sculptures arabes, pour rappeler aux fanatiques musulmans que l’art élève haut  les âmes ; car je ne peux imaginer les tapis berbères et les tentes caïdales s’emparer de la belle esplanade de l’IMA et la squatter jusqu’au 15 janvier 2015.
Ne vous ai-je pas écrit dans la lettre que j’ai eu l’honneur et le devoir de vous adresser, le 13 juin 2013 – oui, le 13 juin 2013 – que : Je souhaite que mon pays, le Maroc, puisse, à travers « Le Maroc contemporain à l’Institut du monde arabe », offrir aux Français, et surtout aux Marocains, travaillant et résidant en France, une image d’un Maroc moderne et créatif, inventif et audacieux, et non la carte postale d’un Maroc, royaume des inerties renouvelables.
Croyez-moi, nous ne sommes, Sophia Hadi et moi, ni fâchés, ni déçus, de ne pas être invités par vous,  monsieur Jack Lang. Mais vous pouvez croire que je suis plus que scandalisé et dégoûté d’apprendre que c’est FIEVRE, un film français, un petit film français à tous les niveaux, qui va refléter le miroir de notre cinéma marocain à l’occasion de la tenue de Le Maroc contemporain à l’Institut du Monde Arabe, « Le Maroc aux milles facettes », l’invité d’honneur de l’Institut du Monde Arabe aux mille facéties.
Car ce choix franco-français, qui est une farce et une facétie, montre combien j’ai eu raison de vous écrire, dans ma lettre du 2 août 2014, que je ne peux  imaginer la grande manifestation culturelle Le Maroc contemporain à l’Institut du monde arabe (14 octobre 2014/ janvier 2015), ressembler comme deux gouttes d’eau à «L’année du Maroc en France» (janvier 1999-janvier 2000), où seuls les copains et les coquins, les proches et les amis ainsi que les privilégiés du Service Culturel, relevant de l’Ambassade de France  à Rabat, furent choisis et invités à présenter leurs travaux, se partageant ainsi le butin, en toute quiétude et insouciance. Ces tristes temps, qui doivent être révolus à jamais, ne semblent pas vouloir quitter les mentalités et les manies des hommes et des femmes qui président aux destinées de ces manifestations culturelles, car, aussi bien pour L’année du Maroc en France» que pour Le Maroc contemporain à l’Institut du monde arabe , c’est quasiment le produit francophone d’un Maroc francophone que les paternalistes et autres nostalgiques de la France coloniale,  aiment montrer et exhiber à l’étranger et aux étrangers, en érigeant ce produit comme le fer de lance de la création artistique et créative au Maroc.
Si la contemporanéité artistique marocaine ne peut être liée qu’à la langue française, croyez-moi, cher monsieur Lang, nous ne sortirons pas de sitôt de l’auberge espagnole ; car notre pays, au niveau des langues parlées, est actuellement une véritable auberge espagnole, comme vous avez pu le constater, le jour même de l’inauguration par le roi Mohammed VI du Musée d’Art Contemporain qui porte son nom, quand le directeur général des Musées du Maroc, le franco-marocain Mehdi Qotbi, a tenu a faire sa lèche devant le roi et ses illustres invités, dont vous-même, en langue française, comme si pour un pays comme le Maroc la langue française était la langue maternelle des citoyens et la langue officielle du Maroc. Or, dans la Constitution Marocaine actuelle, rédigée par des théologiens, des intellectuels, des penseurs et des politiciens, dont une bonne partie francophone, à aucun moment, ni dans aucun chapitre, il n’est fait allusion à la langue française comme étant la langue parlée au Maroc, alors qu’elle est royalement la langue qui dirige la vie administrative et économique du pays.
Et c’est dans cette belle perspective, celle de l’amour que je porte à la belle langue française que j’ai souhaité, dès juin 2013, venir à l’IMA présenter LA CHUTE d’Albert Camus, interprété par une grande comédienne et actrice marocaine, grande et belle, comme le sont les belles et grandes comédiennes et actrices françaises, dont la France  s’enorgueillit quotidiennement.
                                                                                Rabat 12 octobre 2014
                                                                                 Nabyl Lahlou


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